Jeudi 12 avril :

NAIVETE 1


Et si je déclare que je suis naïf -est ce que, sachant qu'un homme averti en vaut deux, cela m'enlève ma naïveté ? Il faut croire que oui -que cette naïveté étant maintenant consciente- (celle-ci) installe alors un climat de méfiance voire ... de mensonge ! Si je suis naïf et que je le sais, j'ose cependant dire que je le reste. Non pas qu'il s'agisse d'un caprice ou d'un mensonge mais bien de fidélité à soi-même, à sa "nature" (facteur humain). Et si je veux déjouer ma naïveté -me faudra-t-il tomber dans le complot, l'hypocrisie et autres techniques individualistes pour tromper l'autre ? Il faut croire (encore) que non. Car ce que les hommes imaginent, il ne peuvent s'empêcher d'y croire (qu'ils le veuillent ou non). Nous donnons, en imaginant, une possibilité, un crédit aux choses d'être vraies !

Mais alors naïf ou non, notre sort est-il le même ? Non - le naïf ne peut avoir alors que de tort contre sa nature et il ne lui reste plus qu'à s'en repentir... tandis que celui qui complote peut lui se détacher de sa responsabilité en adoptant une autre attitude et en brisant les essences. Le fort intérieur chez le naïf fait preuve d'inadaptation alors que le fort intérieur du comploteur, du menteur s'efface au profit de l'adoption des normes de sa classe, de sa religion, de la majorité, du modèle de civilisation ou même encore de sa vocation.

L'art et la naïveté :

L'art et l'artiste doivent-ils être naïfs ? L'art connaît -par ce qu'on appelle art contemporain- une forte régression -je pense-. Il se veut de plus en plus conceptuel et de moins en moins conventionnel. Or si l'art est un acte libre, ces dérives empêchent l'art , à force de dénonciation, de critiques, de révolutions artistiques permanentes, d'exister. Comme on pu le dire Dubuffet (asphyxiante culture), Finkelkraut ou encore Lipovetsky (l'ère du vide) : toute création devient dépassée avant même d'avoir été réalisée. par exemple, l'abandon des techniques et des cadres conventionnels à l'art s'est fait beaucoup trop rapidement, la marchandisation de l'art, et les ressacs de la mode ont abattu toutes les formes d'arts, ainsi, l'artiste emblématique qui à mon goût incarne bien cette dégradation de l'art est Picasso : On est passé progressivement de l'artiste complètement banal, voire marginal, à une espèce de génie qui a simplement su répondre aux effets de mode, il était dans l'air du temps et passait son temps à briser l'art jusqu'aux tripes. Si on reprend ses œuvres du début de sa carrière, on y aperçoit que des tableaux qui n'attire que peu de temps voire pas du tout l'œil du spectateur. Puis Picasso choque et entre dans la mode pour finir dans l'abstrait total. Le peintre à la fin de sa carrière ne trouvant qu'à faire des "gribouillages" qui sont aujourd'hui encore vu comme des chefs-d'œuvre.

Marcel Duchamps s'inscrit également dans cette régression, car il a cédé lui aussi à la mode. (n'est ce pas "on est beaucoup" ?) . Marcel Duchamps expose un chiotte dans un musée, l'idée certes est (était) lumineuse, mais elle dégrade profondément l'art, le bouleverse. C'est pourquoi, l'artiste se doit aujourd'hui aussi naïvement que possible ou bien dans une stratégie de complot (qui amène l'homme à croire finalement ce qu'il dit, pense et fait) contre l'ère du vide et la désintégration de l'art. Il ne s'agit pas là de prôner un certain conservatisme mais bien d'offrir à l'art une possibilité de perdurer, pour sauver fondamentalement nos libertés. Exemple : [ce que tentait précisément de faire] Jean Dubuffet en donnant le pinceau à des fous ou bien des enfants en bas âge.


Marcel Duchamps (1917) Fontaine.

C'est donc, que "MON CACA", bien qu'il ne s'agisse pas d'une œuvre, vaut nettement mieux que Marcel Duchamps car il est représenté naïvement et avec toute la simplicité d'une pensée qui dit : ce que je fais je pense que c'est de la merde (d'où le nom de "petit coin" où j'affiche mes dessins). Cependant me diriez-vous, "MON CACA" dénonce aussi l'anti-conventionnalisme de l'art. Oui, mais cette interprétation intervient APRÈS la création de "l'œuvre" voilà toute la nuance, et que si "MON CACA" ne m'appartient plus car soumis au critiques et au "public" - je peux moi aussi donner en tant que spectateur cette fois mon interprétation.

De plus la forme choisie, sans technique aucune, sans forme conventionnelle peut aussi viser à s'autodétruire et à pousser le monde ou les artistes à faire plus abstraction du merdier autour de l'art. L'objectif étant à créer ou recréer un art plus conventionnel cherchant plutôt la beauté de la forme et de la technique plutôt qu'à avancer le sens de l'œuvre. Il faut rendre à l'art sa force en lui rendant ses formes. Le sens de l'œuvre s'en trouvera ainsi mieux mis en valeur, et je pense que le débat sur la forme que l'art doit avoir doit prendre fin, l'art n'a pas de forme, pourtant si l'on s'éloigne de sa forme, il y perd tout son éclat et surtout de son sens (si tenter de croire que l'art à un sens, ce qui pourrait être une bonne raison pour clore cet épisode complètement décalée de l'art). Il faudrait que l'artiste laissasse à ses récepteurs des pistes de réflexions, tout en rendant sa beauté à l'œuvre, la réflexion ne doit plus appartenir à l'artiste seulement.

...Mais rappelons tout de même qu'il s'agit là d'une hypothèse...

 

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