Samedi 15 Septembre :


GESTION DE FLUX.

Exceptionnellement je prends position explicitement en politique sur ce site...

Tout a commencé un jour, récemment, mais avec cet air de déjà vu. Je regardais la télévision : tellement séduisante, tellement indépendante, tellement innocente... En rentrant du boulot, sur une chaîne d'info continue, je suis informé que des sans-papiers sont éjectés de leurs toits. Procédure encadrée par des représentants de la loi, des forces de l'ordre public, l'exécutif de notre république. Un arrêté préfectoral les somme de partir. Ces sans-papiers se retrouvent alors dans la rue et ça fait de belles images. Ces sans-papiers sont maintenant sans-domicile, un peu comme si on voulait les comparer à des clochards, pour bien souligner qu'ils n'ont rien à faire ici, pour bien insister dans les cerveaux que ce sont bien des parasites. Mais ce qui m'avait particulièrement choqué, c'était que l'événement se passait à Roubaix, or je vis à Croix et je travaillais à Roubaix. D'un coup d'un seul j'ai eu un déclic. J'ai approché la tête de l'écran, et j'ai regardé ces gens. Ce qui m'étonnait, c'était que ces sans-papiers étaient ici même, vivaient à quelques rues de chez moi. Et j'en suis sûr ; j'en ai certainement déjà croisé dans le métro, ou dans le centre, ou même peut être dans un restaurant ou la terrasse d'un café me servant une collation.

Je réalisais que ces gens faisaient partis de mon quotidien sans que je le sache. Je venais d'abolir une vieille image dans ma tête. Et non ! Ce ne sont pas des tribus qui viennent skouater notre cher pays avec leurs costumes traditionnels, sans parler un mot de notre langue, vivants cachés la nuit sous les ponts et d'une dangerosité qui nécessiterai, par exemple, trois voire quatre fourgons blindés de la police pour les maîtriser. "Goulou goulou ! Nous sommes des sans-papiers, on est méchant et dangereux ! On vient voler ton pain ! Nous sommes des étrangers ! Goulou !". Puis, pour exister, pour ne pas disparaître aussi rapidement, certains d'entre eux ont entamé une grève de la faim pour lutter contre l'indifférence générale. Leur espoir est de se faire régulariser, d'être en règle, de pouvoir enfin travailler dans la légalité, de réaliser une bonne installation et une intégration modèle. Ces gens demandent à entrer en légalité ! Rendons nous compte, ce sont des hors la loi qui veulent suivre cette loi : Seul rempart, l'État.

Il est vrai que la France est un pays pauvre, qu'elle ne peut pas se permettre d'accueillir des hordes d'immigrés, des millions d'immigrés, l'invasion ! ça y est ! Retrait dans le coq au vin chauvin ! Il est vrai également que la France n'a absolument pas besoin de toute cette misère, on ne veut pas les pauvres des autres pays, on a pas besoin de cette main d'œuvre ultra pas chère... Il est évident que cette histoire de retraite à financer, sachant qu'il y aura plus de retraités que d'actifs et avec le vieillissement de la population, nous n'avons pas besoin de travailleurs et que les retraites vont se financer toutes seules, parce qu'on aura trouvé une autre solution miracle (découverte d'un trésor de plusieurs centaines de milliards ou bien extermination des vieux ou bien suppression des pensions ou bien rallongement de la durée de cotisation ou encore augmentation des taxes, des cotisations et des impôts massivement). La plupart des vieux sont cons : Ils sont égoïstes, pensent à leur petit capital, essayent de préserver ce qu'ils peuvent mais ne font aucun pari sur l'avenir... 'Faut vraiment être con pour se foutre une balle dans le pied. Et... ça vote... Et... ça vote...

Voilà, c'était pour l'aspect économique. Mais il y a aussi un autre drame derrière tout ça, le drame humain. Mais tout d'abord il faut bien comprendre que ce ne sont pas des sauvages et qu'il s'agit bien d'hommes, de femmes, d'enfants, parfois même des vieux. Les cons croient que la France est grande, que la France est belle et qu'on se tape toute la misère du monde. Ces sans-papiers n'ont pas beaucoup le choix, ils viennent chez nous car il n'y a rien chez eux. Ils se démerdent avec rien pour traverser le monde, leur misère est la même chez nous, la France n'est pas un paradis. Soumis à la clandestinité, une inexistence assurée, des fantômes qui bossent au black, dans l'ombre, sont exploités. (Parenthèse : au black ça peut être intéressant, un coût du travail pour un prix souvent dérisoire, et en plus même pas de protection sociale, ni de taxes, même pas de syndicats. N'est-ce pas un rêve d'un gouvernement ?). La France, il parait que c'est un paradis : pays des droits de l'homme, de la liberté, de l'égalité, de la fraternité... Des valeurs qui nous sont inculquées dès l'enfance par l'école de la république, au programme. La citoyenneté, la démocratie, les dangers extrémistes etc... Est-ce cette même république qui accomplit cette gestion des flux aveuglément ? Cette république peuplée de hauts fonctionnaires, des petits préfets qui attentent leur petit fil rouge sang sur un coin de la veste ? Les belles médailles, les honneurs. J'ai honte.

J'ai honte de savoir qu'il existe des quotas, et qu'on nous parle de "cas par cas", ce sont des expulsions massives, où on déchire des familles, où on traite des humains comme des non-humains, qu'on inflige sans aucun scrupule une humiliation puis une déportation ! Et peut être qu'après ça, dans le monde, la France coq au vin aura la même image dans les pays étrangers ? Quel accueil nous réservera-t-on là bas et ailleurs ? Comment peut-on se permettre de laisser (sur)vivre des gens dans des camps de fortune sur les places ou dans des gymnases ? De plus ces expulsions à répétition créé du désordre sur la voie publique, du désordre créé sous l'impulsion des administrateurs qui maintiennent l'ordre public. Petite fille ne sort pas de ton école, on t'arrêtera et on te dégagera même si t'as jamais mis les pieds dans ton pays, devant les yeux de tes camarades. On ne respecte même pas la dignité de ces gens.

Il n'y a aucun intérêt à expulser des sans-papiers vue les raisons invoquées ci dessus. Le préfet attend sa petite légion d'honneur, ses supérieurs la promotion, et le grand patron ? Le grand patron attend les retombées xénophobes et de la peur parce qu'il incarne la sécurité et l'ordre. De toute façon, c'est tout bénéfice, les citoyens ne sont pas assez nombreux et les pigeons ont les pétoches et voteront. Et les Goulou-Goulou ÉTRANGERS MÉCHANTS SANS PAPIERS peuvent toujours crever de faim parce que tout le monde s'en tape !

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