Mercredi 03 décembre
Lundi 15 Décembre

Gérard
ou
La dépossession de l'identité.

 

>Sachez-le, je suis vraiment un petit con. Vous voilà prévenus. J'ai découvert un jour l'excellent fan-club officieux de Mr Gérard. Pour ne pas t'égarer cher lecteur qui daigne lire cet article, je vais te dire qui est Gérard même si cela importe peu. Gérard c'est un professeur d'Esthétique à l'université de Lille III au département Arts Plastiques dans cette ville où on ne sait pas reboucher les trous : Tourcoing (On n'y arrive pas parce que les gens mangent la terre, c'est notre hypothèse). Il se trouve aussi que je suis dans cette même école et que je suis un de ses élèves.

Essayons de dresser un portrait objectif de ce monsieur : Gérard est le sosie de Léon Blum en beaucoup plus grand même si Léon Blum parait plus misérable. On pourrait peut être plus facilement le comparer à Jean Rochefort même si Jean Rochefort est beaucoup plus introverti que lui. C'est un grand type et plutôt mince avec une moustache, une moustache un peu comme celle de José Bové mais en plus courte et plus grisonnante. Ce monsieur fait des grands gestes parce qu'il a de grandes mains. Certains osent avancer qu'il n'a pas que ça de grand puisqu'ils (et elles) le surnomment "sexe en bois"(Cf. Sophia G. sur Facebook : Sophia G. a écrit le 7 novembre 2008 à 23:16 gérard ****** mon petit s... en b... !! c'est tout une histoire ! merveilleuse cela dit ! huumm huummm !!). A noter ceux qui pensent cela sont, ou bien des obsédés fanatiques de Gérard, ou bien des gens qui traînent dans la boue ce papi dynamique. Ceux qui sont séduits par sa dimension "chêne massif" ne sont pas libérés du "fétichisme du professeur", et à contrario ceux qui ne sont pas séduits et qui utilisent cette dimension en faveur du ridicule ne sont pas mieux lotis et sont en plus des enfoirés. Il porte des lunettes et il s'habille comme si tout les jours était un jour d'automne.

C'est un mec plutôt jovial mais personne ne sait vraiment ce qu'il pense, je sais (après enquête) qu'il serait adepte de la décroissance, mais il n'en fait pas d'allusions explicites dans ses cours. C'est aussi un mec qui nous parle essentiellement de Platon depuis deux ans. C'est un homme pas tout jeune car/et il rabâche pas mal. Notre homme marche de façon étrange, il marche la tête un peu en avant, il semble avoir un pas très souple, il glisse dans l'espace comme s'il était le dieu Pan. Lorsqu'il veut faire peur à quelqu'un, il se glisse tel "Merlin" (cf. Mickael D. sur Facebook : Mickael D. a écrit le 24 novembre 2008 à 22:29 il me rappelle le merlin de Disney) derrière la personne et lève uniquement l'avant bras et d'une voix fantomastique "Vous (un temps) là". Une autre phrase culte de ce monsieur nous est rapportée depuis Facebook encore, puisque c'est le lieu de la dépossession de l'identité de Gérard par Cha G. (Université Lille 3) (qui) a écrit le 9 novembre 2008 à 20:26 Il faut... mais il suffit.... > Référence directe au cours sur Platon.

Finalement, je suis désolé mais ce n'était pas un portrait objectif de Gérard. Je n'ai pu m'empêcher de mettre les pieds dans le plat en utilisant les citations de Facebook. Ne m'en veuillez pas mais comprenez ; je manque cruellement d'imagination sur ce monsieur.

Le fan-club officieux de Gérard pourtant est dangereux. Gérard, et il ne doit pas le soupçonner, lorsqu'il rentre dans cette institution du web, n'est à ce moment plus maître de son image car n'importe qui peut dire n'importe quoi sur n'importe qui. C'est là la vraie révolution médiatique d'internet. On ne fabrique plus de la même manière un mythe. Le mythe n'est plus créé par des instances fixes, mais par des acteurs fantômes. Ainsi tout le monde peut devenir mythe et aussi en créer d'autres. Certes le cadre sur Facebook est plus restreint, néanmoins, puisque tous les jeunes sont entraînés dans ce tourbillon, ce fan-club a une influence sur l'image de l'homme que nous nous faisons en tant qu'élève. Cela dit je ne fustigerai pas ce fan-club car je n'ai pas envie de dire que Facebook est à lui seul responsable, et il ne m'apparaît pas intéressant de m'insurger contre Facebook de manière primaire. Gérard est lui même l'auteur de son propre mythe. Sa fonction fait déjà beaucoup, la jeunesse sans valeurs dit-on continue de considérer le professeur comme un être supérieur par son savoir, quelqu'un qui a une maîtrise de soi et aussi des autres, c'est quelqu'un qui sait tout sur tout. Le professeur, c'est un être mi-homme mi-dieu, et il exerce autant de la peur que de la fascination.

Un mythe se constitue d'une manière assez simple, il faut tout d'abord, un signe distinctif, >une petite main dans la veste et un grand chapeau pour Napoléon, un long nez et une beauté magnifique pour Cléopatre, un regard qui fout le camp pour Sartre,< de manière à se représenter plus facilement le personnage. Il y a une esthétique du mythe, il faut qu'au premier coup d'oeil, il soit reconnaissable, on appellerait ça aujourd'hui "être télégénique". C'est alors Gérard qui a décidé parce qu'il se comporte de façon bizarre (et il a raison) d'être "télégénique", parce qu'il a choisi d'avoir des moustaches très ostensibles et d'avoir cette gestuelle pour accéder au mythe. Le mythe aussi se joue dans la séduction du public, Gérard nous séduit tous lorsqu'il prend la parole, Gainsbourg même s'il se traîne comme une poubelle nous touche, Poutine impressionne lorsqu'il est autoritaire. Cette séduction tient dans la puissance qui est exercée, Hercule pour la force, Socrate pour l'intelligence, Roméo pour l'amour, etc. Aussi, à chacun de ces hommes, le mythe est associé à une histoire. Cette histoire en occurrence ce sont les anecdotes de Gérard, c'est aussi Platon, c'est également notre quotidien revisité. Dernier point pour que le mythe soit prêt, il faut un narrateur et ce narrateur c'est NOUS ! Nous récréons une dimension épique dans nos tristes vies.

Et faudrait nous en excuser, la vraie raison de cet article, c'est que je m'inscris contre le mythe et que cet article n'est là que pour nous donner une piste pour s'en libérer. La technique utilisée par exemple pour Hitler de manière habituelle vise à censurer et à s'autocensurer, le mode opératoire actuel veut cacher ce qu'il résulte du mythe, c'est à dire la fascination d'un homme qu'on le veuille ou non qui est devenu mythe. On le voit cela ne tue pas les fans du petit Adolphe. Je propose plutôt de s'attaquer directement au mythe, il faut le démonter. Ne laissons pas les mythes actuels nous séduire, le mythe donne une vision de l'homme comme s'il était universel, il est dépossédé de son identité.

Le mythe est maintenu simplement parce qu'il profite à la bourgeoisie, elle impose des images au monde entier, elle en profite pour contrôler notre culture. N'importe quel objet, ou homme mythique appelle à une complicité qui fait qu'on serait prêt à défendre ces objets ou ces personnes (par exemple le fromage Français), le mythe est un discours qui cherche les passions et qui par là établit une morale. Cette morale bourgeoise qui en profite pour nous enduire de chloroforme. Notre image du monde correspond alors à celle de la bourgeoisie, le paysan ou l'ouvrier devient l'allié du bourgeois duquel il était l'ennemi hier. Et je vais vous dire ce discours va tellement loin que nous recréons aujourd'hui nous même une mythologie sans nous en rendre compte. C'est en cela que Facebook est un instrument bourgeois, il est dans la contemplation, le déplacement d'un homme vers une entité insaisissable, éternelle dans la recréation sans cesse de son identité, il suffit d'y mettre ce que l'on veut. Son identité n'est plus stable, elle change à chaque instant, il peut être un chic type et puis le lendemain être considéré comme un terroriste, tout cela à une vitesse affolante.

Et je vous le prouverai.

Quant à Gérard, il créait son mythe pour pimenter sa vie et pour capter un peu plus son auditoire, peut être aussi pour mieux abattre les autres mythes. Rendons lui son image.


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