L U N . 1 7_ M A I


L ' E S P O I R

Si vous saviez comme il est difficile d'essayer d'être droit dans ses bottes, bien dans ses pompes dans ce monde que tout le monde ne cesse de déplorer comme fou. Je fais aussi parti de ceux là, ceux qui pensent que le monde est vraiment fou. Le monde, il est vrai, ne tourne pas rond, beaucoup s'en accommodent, tout en disant qu'il est fou, ils finissent par tirer leur épingle du jeu. D'autres, un peu comme Jérôme Kerviel, le banquier fou qui dit aujourd'hui que la finance est folle, ont été ou sont complices de l'état du monde dans lequel ils vivent. Beaucoup baissent la culotte : Moi-même, je ne sais pas ce que je ferai si je gagnais demain au loto le jackpot, resterai-je aussi écorché qu'aujourd'hui ? A toujours refuser l'inacceptable. Je n'en sais rien. Pour illustrer ce propos j'avais pensé à un extrait issu du livre Germinal de Zola, il y a un passage dans un bistrot où un homme lit un article : Des ouvriers ont gagné cent mille francs, ils étaient onze, je crois. Sur ces onze, je dis bien -me semble-t-il-, tous ont déclarés vouloir être rentier et ne plus travailler, sauf deux. Ces deux là n'ont pas racheté un outil de travail pour exploiter d'autres ouvriers, ils ont même continuer à travailler, pour garder une activité dans leur vie.

Et bien, ces deux là sont des hommes immensément respectables. Comme il n'est pas aisé de rester droit dans ses bottes, surtout lorsque les autres ne le sont pas. La tentation est grande, facile, de faire comme eux, et comme ceux qui les exploitaient. L'égoïsme et la fainéantise cherchent à nous corrompre.

Et pourtant, il est possible que de tels hommes fassent de ces choix. Il est possible d'avoir assez de force d'esprit, plus que des circonstances pour ne pas céder. Leur conviction n'est pas dictée par le fait qu'ils n'ont rien, elle est au delà. A présent qu'ils ont de l'argent, leur engagement reste aussi beau. Et c'est bien connu, même si je n'aime pas les adages, nous n'avons pas encore vu de fauchés qui ait fait les pensées révolutionnaires. Et pourtant, leur pensée allait bien vers les exploités, les dominés, alors qu'ils n'en étaient pas.

Et comme il est dur de lutter contre ces dominations. Je n'ai rien, je suis seul, je passe pour un extrémiste radical auprès de ceux qui disent que le monde est fou. Mais Loïc, quand même pas, la fin du capitalisme, tu vas pas un peu loin ? Ça me coupe l'estomac en deux. Je ne comprend pas, je défend quelque chose de juste, le minimum censé, le plus humain possible. Je ne dis pas que j'ai raison sur tout. Mais exploiter des gens, il faut le dire, tout le temps, on ne le dit pas assez, ça ferait pathétique et naïf : C'est mal. Je ne dis pas qu'il faut tuer les patrons, je ne le dis même pas. Je dis qu'il faut que le travailleur vende son travail à sa juste valeur, je dis qu'il ne faut pas gagner sa vie sur le dos d'un autre. C'est pourtant simple.

Et toutes ces conneries, le racisme, le machisme, l'homophobie, tout ces petits trucs qui dégueulent sur nos trottoirs. D'où nous sortent-elles ? Et on a beau être moralisant, on nous claque à la gueule d'autres infamies, encore pire. Je ne parle pas d'idéologie. Je parle simplement d'un principe qu'il ne faut pas aller plus loin ! On ne domine pas quelqu'un. Il ne faut pas faire volontairement du mal à quelqu'un.
C'est tout et il faut s'en tenir.

Ô combien il est dur même quand on défend ça, d'être à rebours. Je me fatigue, j'ai le désespoir des oiseaux mazoutés. Je me débat, j'essaie d'œuvrer du mieux que je peux. Oui, je veux changer le monde, parce qu'il n'est insupportable. Et rien ne revient, rien. Je donne des coups d'épée dans l'eau, ça me désespère. Si vous saviez comme ça pourrait être simple, que tout ceux qui pensent que le monde ne tourne pas bien décidaient d'arrêter de lui donner du crédit en s'en accommodant. Ça changerait peut être. Utopie ? Où ça ? L'utopie c'est le capitalisme lui-même. Ne vivons nous pas dans un monde que nous trouverions inimaginable tellement il est injuste !? Comment avons nous bien pu faire pour en arriver là ? Ahh oui... égoïsme et fainéantise... C'est écrit plus haut.

Qu'importe, je n'ai pas le choix, je sortirai dans la rue tant qu'il le faut. J'espère seulement l'amour pour vivre sur autre chose que ça, cette société qui pue et qui me zappe le moral lorsque j'ai envie de m'énerver sur les clochards (même les plus vulnérables sont impitoyables) et que je n'engueule pas parce que je sais qu'ils ne sont pas entièrement responsables de ce qu'ils sont. Il suffirait d'un peu de bonne volonté. Regardez, les deux qui ne sont pas devenus rentiers ! Ils existent vraiment. Ils valent le coup. Tant qu'il y aura de ces gens là, je ne serai jamais convaincu que l'homme est pourri (ils le disent trop vite). Et tout n'est pas perdu, cette chance existe, et tant qu'elle existera, elle vaudra toujours le coup de monter au créneau ! Mais pour cela, il faut que tout le monde y mette du sien, il faut que tout le monde se donne une chance. Si on ne tend pas vers cette chance, il n'y a aucun moyen d'y accéder. Et l'on se retrouve à se lamenter mollement convaincu d'un manichéisme propre à l'homme avec une espèce de relativisme faussement scientifique et faussement sage, c'est que -déjà- vous n'y arriverai jamais.

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