TABULA RASA 5 :
Vingt milles lieues par delà la Terre

 

 

Sous les bruits de perceuse, de coups de marteaux, de bruits de taules froissées ou bien cisaillées : je me réveillais enfin. Ma tête comme dans la soute d'un grand paquebot vide mais remplie de grillons en rut. La responsable n'était pas bien loin. Ce petit bout de femme s'était décidé à quitter la Terre, avec ou sans moi, avec ma propre Twingo. Après qu'elle eut tenté vainement de me réveiller, elle s'était mis dans la tête que nous devions partir le plus tôt possible. Pendant mon sommeil (donc pendant que je lui portais peu d'attention), cette blonde avait rempli ma voiture de toutes mes boîtes de cassoulet, de toutes les cordes et autres harnais disponibles. Elle avait eu l'excellente idée, en esquintant ma carrosserie, d'avoir soudé mon chauffe-eau rempli, pour le long voyage qu'elle préparait. Mais aussi, point important, elle avait mis une de mes meilleures bouteilles de whisky dans la boîte à gant. Je l'avoue, j'étais un peu fâché qu'elle ait tué ma carrosserie mauve. Ma voiture c'est mon petit bijou, elle ne vaudrait plus rien à l'argus, et les assurances ne vont certainement plus m'assurer. Premièrement sans doute les assurances n'existent plus, deuxièmement les dégâts sont provoqués volontairement, et puis troisièmement, "retournement gravitationnel" ou "je ne sais" n'est sûrement pas classé en catastrophe naturelle. Je déplaçais ma masse maladroitement, pesante jusqu'à la cave qui faisait office de garage. J'ouvrai la porte et je m'appuyais contre la boiserie. Je baillais et me grattais la tête :

_ Vous ne vous arrêtez jamais vous...




Ensuite, je montais à la cave, je tombais dans les escaliers. Ba-da-boum-ba-da-ba-da-ba-boum ou bien une chute similaire. J'avais plutôt mal à ma jambe. Je me mis pleurer, honteux. Elle m'aida à me relever, me tendit un mouchoir en papier avec des petits oursons et elle enchaîna tout de suite à expliquer les raisons de son départ. Elle se reculait de deux mètres, puis elle prit un air grave et sérieux, ses jambes bien droites, et elle serrait le bas de sa veste, pendant ce temps je me tordais de douleur, assis sur la troisième marche du nouveau bas. Elle me tient à peu près ce langage ; "Monsieur, il ne faut pas rester ici, la ville est sur une ancienne faille sismique. De plus, si on reste ici à camper, nous finirons par user des vivres inutilement, sans rien faire. Je propose que nous allions dans l'espace. Là bas, il y a de quoi survivre plus longtemps. Prenez aussi en compte qu'il y a les océans là haut, que nous pourrion y trouver du poisson, et il y a certainement d'autres humains et même des animaux qui flottent, j'en suis sûre, certes j'ai peut être l'air scientifique, mais je fais aussi confiance à mon instinct de femme. Venez, faîtes-moi confiance" J'acquiesçais. Après tout, il y a peu être mieux ailleurs. De toute manière, je voulais rester avec mon whisky, mon cassoulet et ma Twingo. Cependant, afin d'avoir le contrôle sur cette femme un peu hystérique, je lui fis comprendre qu'il était hors de question que ce fût elle conduisit.

_Ne perdons pas une minute. Dit-elle.

Je mettais les clefs dans le contact. J'évitais de me poser trop de questions, et pour suivre ce qu'elle avait déclaré, je me fiais aussi à mon instinct sauvage, à mon instinct viril afin de ne pas faire face aux sérieux problèmes de l'instinct intellectuel qui, je le sentais, menaçait de m'envoyer dans une spirale de questions, d'incertitudes, et de sentiments peureux qui ne viseraient qu'à l'immobilisme. Ainsi, je me contrôlais et m'empêchais de penser au suicide que j'étais peut être en train de commettre, c'était ça aussi la fin de l'humanité, la fin du facteur humain. Je mettais de coté ma douleur à ma jambe et je démarrais, elle ouvrait la porte du garage et monta à coté de moi en claquant la portière.

_Oh, doucement. Lui dis-je gentiment en espérant qu'elle verrait mon désespoir lorsque je pense à la voiture.

J'avançais avec un maximum de vitesse pour ne pas accrocher la bagnole à la maison. Et c'est enfin que nous tombions.
Nous ne vîmes qu'une ombre s'éloigner à une vitesse incroyable. A vrai dire, nous nous occupions de résister à la forte pesanteur. Puis tout à coup, nous nous arrêtames. Nous avions réussi, nous étions en orbite. Je me remettais de mes émotions, et puis je contemplais quelques instants la terre. La petite planète bleue.

_Aurevoir... Adieu peut-être...
_ATTENTION !
_Humm ? Quoi ?
_Ne restez pas là ! Un arbre nous fonce droit dessus !

Et effectivement, un arbre percute la voiture.

_Hé bien alors, tout va bien ? Voyez s'il y a de la casse.
_Non, mais...
_Quoi... Encore un arbre ?
_Nous ne sommes plus en orbite.
_...


Pour ceux qui n'aurait pas compris cet épisode n'est pas le dernier !
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