L U N - 2 8 - D E C


A N N É E . P E R D U E
M O I S ..... É G A R É S

 

 

Un mec pressé nous a un jour demandé dans la rue une cigarette.
"T'as pas une clope ?"
J'en donne une.
"Merci, mec"
Cinq minutes après, on le recroise.
Sans nous reconnaître, il demande du feu pour allumer la clope que je lui avais filé.
"S'il vous plaît, vous n'auriez pas du feu ?"
Je ne réagis pas, je ne m'indigne pas, et je trouve ça même plutôt drôle.
Je sors un feu que j'ai eu la veille, ou l'avant-veille, je ne sais plus. Il y avait deux petits chats dessus.
C'était un arabe à moitié bourré qui me l'avait donné pour me remercier de lui avoir donné une cigarette.
Simone avait vu, elle comprenait que le bonhomme était un peu louche.
Fraîchement revenue des United States, elle m'avait fait remarquer le nombre anormal de marginaux et d'hommes bizarres errants à Lille.
Je n'étais pas choqué, non pas que je les ignore mais je suis habitué à les voir tout les jours.
Pour moi, ces anormaux sont mes normaux.
Je parlais leur langue.
Le mec me dit :
_Tu sais combien d'années j'ai perdu ?
_Je ne sais pas, moi j'en suis à huit mois, et toi ? Répondis-je.
_On m'a volé deux ans, on m'a spolié, tu sais ce que ça veut dire spolier ?
_Oui, t'as fait quoi ?
_On m'a tout fait, heureusement j'ai arrêté les médicaments.
_Qui t'as donné des médicaments ?
_'Faut faire confiance à personne, (monologue) ils m'ont tout pris, j'ai plus d'argent, j'ai plus rien, même la santé ils me l'ont prise. Mes parents, mes amis m'ont tout pris, ils sont tous partis, faut pas avoir d'amis. (Le mec parle assez vite, même si ses intonations sont lentes) Maintenant j'ai envie de partir, je vais partir à l'étranger quelques temps. Je vais me refaire des amis.
_Je comprends, c'est important les amis.
_Non, je veux plus voir personne. Les amis c'est de la merde.
_Ah...
_Non mais ne t'inquiète pas : (il sourit) J'ai laissé des subliminales partout.
Puis il s'en va, sans dire aurevoir, ni merci, ni un coup d'oeil.
Il est déjà ailleurs.

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