M A R - 2 2 - D E C

P E N T E . G L I S S A N T E

 

 

La neige fond, les températures remontent. Il y a sur les routes des monts de neige grise que les voitures ont épargné. Les trottoirs sont encore incertains et les pieds des rares passants sont prudents. J'étais retranché chez moi, lorsque tout était cristallisé, la beauté figée, le blanc pas encore souillé. Même le chat n'ose pas, il marche dans les traces qu'il a déjà faite, ses coussinets doivent être froids. La vie était paralysée.

A un moment de la journée j'ai pensé que je serai dehors sur la piste cyclable du grand boulevard, j'entrevoyais une vie dans une ère glaciaire ici. J'y essayais d'allumer un feu dans un coin parce qu'il faisait nuit et froid, que personne ne pouvait me venir en aide, j'aurai déchiré le carton de mon paquet de cigarettes vide pour avoir un peu de chaleur sur les doigts. La vie sauvage à l'arrêt Saint-Maur entre ces grands immeubles indifférents. Je pouvais tomber en marchant, je n'aurai pas le choix, je devrais me relever. Voilà les flocons qui en remettent une couche. Ils forment un drap épais qui me réduit la visibilité à moins de vingt mètres. Je tremble et le vent efface mon image. Pas de voitures à cette heure-ci. Tout le monde a dû trouver quelqu'un pour loger sur place en attendant que ça se calme. Suis-je le seul à être sous la neige isolé au milieu de la ville ? La civilisation disparaissait mais ses restes étaient menaçants, le macadam pouvait accueillir des plaques de verglas, une bordure peut être cachée, des crevasses remplies d'eau pouvaient être camouflées par l'uniformité de la neige. Je me voyais coincé dans ce blanc monotone et pourtant tellement beau. Je finirai statue de glace sur un piédestal partiellement maculé de neige.

Et pourtant, lorsque le mauvais temps s'en va, que tout semble se réchauffer. Je vois la Bérézina se dessiner. Ces cadavres de bonhommes de neige déformés, se vautrant dans la boue, témoignant d'une défaite redoutable. Le vacarme de la ville reprend. Une voiture passe près de moi, le sol a été salé, elle roule vite. Un bloc de glace dégelé est sur sa route, il est fracassé par les pneus, une partie s'en vole violemment. Je suis a coté et je n'ai pas le temps de reculer. La migration de la glace grise s'achève sur mes vêtements. Je suis trempé et gris aussi.

Je me dis que dans la neige ou dans sa fonte, aucune situation n'est confortable, mais au moins dans la neige, il y avait de la beauté.
Je me sens condamné.
Je ne pense pas que j'aimerai 2010.

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