L U N .3 0. A O U


Ce que je pense de l'article
publié la Voix du Nord du
29 Août 2010
sur ma gueule...

[image de l'article à la fin]


Je tombe sur une fille qui me demande si je serai d'accord pour répondre à quelques questions. Moi, en début de manifestation hebdomadaire des sans-papiers à Lille, je réponds affirmativement pour une espèce de portrait de gens du nord pris au hasard, voyant une occasion de parler de la cause. On me dit qu'on m'appellera le lendemain pour répondre à ses questions puis pour me laisser le temps de me faire une idée sur ce que je peux dire. Un homme assez sympathique me prend en photo, pas une mais plusieurs, une bonne vingtaine, assez gênant tout de même d'être finalement le seul de la manifestation à être pris en photo à part en début de cortège. Passons.

Le lendemain, on m'appelle comme prévu.
On me demande mon nom, mon prénom, ma situation, mon âge etc. On me pose des questions sur la manifestation des sans-papiers, comment je l'ai découverte, ce qui m'y attire, ce que je défends, le trajet de la manif, l'heure du rassemblement en face de la préfecture, le trajet que nous faisons. Je précise alors que c'est une belle manifestation que les chants sont beaux, qu'avec le temps nous nous connaissons presque tous, on est une petite famille finalement et qu'on est sur plusieurs terrains, qu'il existe des manifestations auxquelles le CSP59 se joint notamment à Paris, ou dans des combats plus locaux. Je déplore qu'il n'y ait pas assez de monde vus les événements qui se passent en ce moment, que le cynisme d'Éric Besson et de ses camarades, ne devrait pas être toléré. Je déclare qu'il ne faut pas se laisser faire, que nous avons une tradition dans le nord d'être une terre d'accueil (ce qui est un détail finalement). En plus j'ajoute au passage la date de la manifestation de Lille à Lesquin du Samedi 28 jusqu'au centre de rétention, bien que la veille, pour rappeler ce qu'on appelle la "rafle de Saint Bernard" qui fut 14 ans plus tôt une heure de trop dans les grandes heures de la police française. Je passe assez de temps à en parler.

On me demande ensuite ce qui me marque dans l'actualité du moment. Chouette, je me dis, je vais parler de l'histoire de "Saint Bernard" à Paris que c'est une date à ne pas oublier. Je parle aussi des Roms où le jour même il y avait un rassemblement à République Beaux-arts. Je dis que c'est absurde et scandaleux de jouer comme ça avec des gens malheureux, bouc-émissaire, comme d'habitude. Je dis aussi que je me pose des questions quant à leur avenir là bas, sachant que c'est aussi une minorité mal acceptée. Je disais aussi que c'est regrettable, quinze ans après, qu'on ait plus de véritable défenseurs charismatiques et provocateurs comme Coluche par exemple, ou encore Desproges, qui finalement arrivaient à faire passer des idées, à faire avancer la société, que les années "touche pas mon pote" sont bien finies (Je pensais par là aux humoristes bien trop calmes tels que Dany Boon ou Gad Elmaleh, cul-cul à souhait, à tout le tollé pour un Stéphane Guillon qui parait trop impoli plus qu'incorrect : je ne les aime pas, je ne pardonne pas d'oublier les maux de leurs publics et de se complaire dans les millions que ce même petit peuple leur a donné. Je ne pardonne pas de faire l'apologie du quotidien sans révolte et de s'en accommoder. Je n'aime pas l'édulcoré.) On préfère parler du dernier potin de Secret Story que de ce qui est important.

Puis d'autres questions, un peu anodines, secondaires pour moi, je réponds un peu au hasard, ça ne m'intéresse pas : Vous avez un projet ? J'ai répondu que je travaillais en ce moment que j'aurai un peu de temps avant ma rentrée, que j'ai envie de m'acheter une mobylette et de me balader dans la région, Hénin-Beaumont, Arras, Calais, Dunkerque. Voir un peu comment ça se passe, prendre la température, rencontrer des gens et revoir des copains. Calais sera intéressante, j'ai envie de voir quel boulot font les militants sur place, prendre des contacts [il n'a pas été question de parler directement à des clandestins ou des sans-papiers]. Pourquoi une mobylette ? Je n'ai pas le permis et puis j'ai envie de goûter à la liberté de circuler, je n'ai pas envie de train. Je veux choisir ma route.

Vous parlez de quoi avec vos amis ? Entre étudiants au café, on parle d'art et de philo, souvent politique, tout est lié, on se pose à une terrasse entre nous, on refait le monde tranquillement.

Vous avez des petits bonheurs ? [je ne sais pas quoi répondre] Je parle alors de ma pratique artistique. Je dessine des pylônes électriques, pas les petits, les grands aux abords des autoroutes. Le monde entre les villes m'intéresse, particulièrement dans la France du vide. J'aime bien les regarder si vous voulez, c'est un objet esthétiquement et symboliquement intéressant, j'aime l'ambiance autour d'Orléans ou de Châteauroux. Ce sont des endroits que tout le monde traverse et où personne ne s'arrête. Il y a un coté irréel quasi-surréaliste qui me donne à voir un monde absurde sur certains points [article bientôt là dessus -non sans incohérence avec mon engagement], je cite l'école de Düsseldorf comme référence.

Vous avez un dicton ?
Je n'ai pas un dicton, mais j'ai une citation de Jean Paul Sartre, ça vous ira quand même ? Elle me tient à cœur... [oui]. Et je cite la phrase de Sartre de l'article du Jeudi 29 Février "Dans la vie on ne fait pas ce que l'on veut mais on est responsable de ce que l'on est." et je précise qu'il est important d'y écrire que c'est une invitation à participer à la manif des sans-papiers, mais aussi, à venir à la manifestation pour défendre nos retraites du 07 Septembre.

Je suis plutôt satisfait, je me dis que j'ai bien parlé.

 


Hé bien je suis dégoutté. On parle de ma vie et la photo est plus grande que le texte.
Quand je vous disais que je déteste l'édulcoré...
J'ai l'impression d'avoir été pigeonné et d'être le bobo de gauche mais pas trop pour qui ça fait bien de parader avec des bons sentiments chrétiens auprès des sans-papiers et des autres camarades. Je me sens pas très bien à l'idée d'être associé à ce genre d'individus [pour qui d'ailleurs les sans papiers ce n'est pas assez chic], j'ai même l'impression de nuire au combat à cause de l'image qu'on a fait de moi.

 

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