Samedi 3 Juin :
La machine infernale ira manger chez vous demain.


 


Je déambulais dans le Parc Barbieux, je ne marchais pas droit, je me foutais royalement des allées faites pour les vieux qui se promènent avec leurs chiens, je me foutais de ce qui m'entourait, de ceux qui m'entouraient, non, je crois que je suis seul, ma vue était trouble, j'avais de grands vertiges, j'avais la sensation que chaque pas que je faisais m'entraînerai dans les pommes, j'avais à peine la force de voir. Quel effort ! Je fais encore dix mètres ou peut être deux. Il y a une poubelle près de moi, j'y dégueule. Je m'en suis foutu partout, je m'en fou, je continue ma route vers la maison. Visiblement, je ne me sens pas très bien, n'était-ce pas le but recherché ?

Je m'était empoisonné pour Francis, un si bel homme. Il était si beau, si gentil, je respirais chacune de ses apparitions, c'était mon rayon de soleil. Je le voyais partout, je pensais à lui tout le temps, je pense à lui encore maintenant. Je le voulais pour moi, lui le savait et n'en faisait rien. Il ne sait pas à quel point j'avais envie de le prendre dans mes bras, de coller mon corps tout entier contre lui, ne faire plus qu'un, ne rien se dire, s'enlacer, sentir sa respiration et rester comme ça sans bouger pendant des temps et des temps. Je lui donnais toute ma tendresse, je passai pour un con à chaque fois devant lui parce que je perdais mes moyens. Je le croisais dans les couloirs du lycée de temps en temps... A vrai dire tout le temps, je m'arrangeais pour le retrouver. J'avais obtenu son numéro et son adresse MSN... Je lui parlais maladroitement, il ne me répondais que très peu. Et chacune de nos discussions se terminait par une défaite pour mon cœur. Non pas qu'il n'est pas bien mais il me donne l'impression que je suis un fantôme parmi d'autres. Mon cœur ne s'est pas trompé, je l'aime.
Je suis amoureux d'un ange.

Je m'inquiétais lorsque j'avais vu sur son journal intime qu'il publiait sur internet, qu'il voulait se suicider ; Il avait fixé un compte à rebours : 11 jours. Je pleurai toutes les nuits. Je ne dormais plus. Et je présentais une tête de plus en plus décomposée chaque matin au lycée. Je ne me risquais pas à l'alcool. Trop dangereux pour mon cœur. Je le voyais encore tout les jours. Et il semblait réellement convaincu de vouloir accomplir ce geste. Il employait un ton dramatique et me brisait le cœur chaque fois que je lui parlais. Je pleurais assez souvent... Même en cours où je n'arrivais plus à faire semblant. Francis était là, à son poste parlant d'autres choses. Les gens qui l'entouraient voulaient l'accompagner, d'autres voulait l'en dissuader. Je faisais parti de la deuxième catégorie. Il avait fait toute une mise en scène pour avoir une belle mort bien magistrale. Il avait prévu de se bourrer de médicaments. Je savais qu'il avait déjà fait une tentative par le passé, une tentative. Je savais alors qu'il pourrait recommencer. Il semblait que j'étais le seul à réellement m'inquiéter. Il semblait que personne ne croyait au fait qu'il pourrait passer à l'acte. Je pouvais faire quelque chose ?

Évidement non, mais c'était plus fort que moi, de au moins s'il ne voulait pas de moi... de le laisser en vie, de faire en sorte qu'il soit heureux. Il ne croyait plus en rien. Moi non plus. Il était ma seul raison de vivre et je ne pouvais rien faire pour le retenir dans l'abîme des profondeurs du vide. Il espérait peut-être quelque chose après la mort. Véritablement, non. Il voulait juste mettre fin à ses souffrances. Il ne m'a pas trop dit pourquoi parce qu'il n'a pas confiance en moi, et il a sans doute raison.. Mais toujours est-il que je lui proposais un bonheur commun. Bien sur, plus pour moi parce que c'était moi qui l'aimait et pas réciproquement. J'étais là... comme un con. Encore. Dompté par mon impuissance. Situation insupportable. Je n'osais pas penser à sa mort... Elle m'était inconcevable. Elle me rongeait jour et nuit. A vrai dire, les croquis de sa mort que je m'était fait dans ma tête était peu réalistes. Je savais très bien que le malheur qui allait m'arriver encore dépasserai mes croquis.

Sans rien dire à personne, je me suis empoisonné. Je pense que je ne pourrai lui survivre, s'il meurt, je meurs moralement à jamais. Alors tant qu'à faire autant vraiment mourir pour m'épargner ces atroces souffrances. Ce genre d'amour, était l'amour, le plus pur que j'ai pu rencontrer. Mais lui, j'y mettais toute ma passion et mon amour... Je n'ai presque pas de libido et je m'éprouvais aucunement le désir de le faire passer dans mes draps. J'ai décidé alors que je me libérerai alors de cet amour, si je ne pouvais l'obtenir. Le spectacle de son visage, de ses yeux, de ses sourcils, de ses mains, de sa bouche, de ses cheveux attachés ou volants dans le vent, de son nez, ou encore de son petit grain de beauté sur sa margoulette près du menton sur le coté droit, m'aurait suffit pour toute l'éternité. Je ne pouvais me passer de lui. Ma raison de vivre.

J'étais esclave de l'amour, j'étais consentant. Mais me passer de lui, me rendrait esclave de ce que je ne veux pas. J'attrapais depuis une semaine, soit quatre jours après ses déclarations sur son suicide, les pommades pour boutons, différents médicaments dont je ne prenais même pas le temps d'identifier, de la crème pour les pieds, du maquillage, des produits vaisselle et même de l'eau Javel, et je l'avalais d'un coup ! -Goût infecte- Mais j'étais rassuré à l'idée que je mourrusse en même temps que lui, tel Roméo et... Roméo. En voilà de la belle magistralité, et j'aurai écrit sur ma lettre d'adieu. Cette fameuse phrase d'Appollinaire ; Et ma vie pour tes yeux lentement s'empoisonne.

J'ingurgitais, non sans courage, tout ces produits qui me mettaient dans les rails de la mort. Une semaine aujourd'hui que je m'empoisonne à petit feu, j'ai perdu cinq kilos. Je me sens mieux. Je me dis que ce cauchemar va cesser. Je n'ai qu'a tripler les doses, voire plus. Je l'avais vu hier et c'était la veille du dernier jour. J'avais demandé à lui dire Au-revoir -il n'a rien répondu-, je lui avais demandé une photo -idem-. J'ai été à l'école ce matin, j'ai dormi et j'ai vomi aux toilettes à l'intercours personne n'a rien vu. Et Francis est absent ce matin. Il n'est pas en cours. J'ai mal à l'estomac, mes mains et mes jambes tremblent.

J'ai vite compris, j'ai attendu que les cours soient terminés. Je suis sorti dans le Parc Barbieux, ivre d'eau Javel. Je fais ces fameux cents pas avec l'estomac en feu. Personne ne me voit, je suis tranquille et j'attends que la mort vienne m'emporter. J'ai oublié de faire ma lettre d'adieu. Je m'en fou. Je marche sans trop savoir pourquoi, mais je m'éloigne du lycée Baudelaire pour éviter que si quelqu'un d'aventure me voit, appelle les secours. Je fais tomber mon sac devant un pin sylvestre. Je continue ma route dans l'herbe. J'avance lentement, je vois de moins en moins, comme si j'avais des jumelles sales dans les yeux. Plus rien ne tient droit, tout bouge dans tout les sens, ma vie ne défile pas. Je fais encore cinq mètres, je m'arrête devant un arbre, un grand platane plus que quinquagénaire et je m'écroule. Je suis par terre devant l'arbre, il y a des cailloux par terre. Ils sont de toutes les formes, ils sont tous différents, leurs couleurs ne sont pas pareilles, elles sont toutes différentes, j'ai devant moi une constellation de petits cailloux, de graviers mélangés avec de la boue et du sable. Vraiment , c'est beau, je respire doucement puis de plus en plus lentement. Je dors. Je respire encore un peu puis...


Il est mort.

Le corps reposait dans cette flaque de boue, sous ce platane dont les bras semblaient toucher le ciel. L'arbre était au fond d'un parking. Le parking de l'arrêt de tramway "Parc Barbieux". Un endroit fréquenté essentiellement par des sodomites en rut. Ils se rencontraient, puis derrière les buissons s'accouplaient. Ou quand il pleuvait, ils faisaient cela dans la voiture. Il y avait cette dépouille sous un arbre. Un sodomite s'approche, puis un deuxième et encore un. Le garçon était beau, sa beauté, et sa jeunesse se reflétait encore malgré l'état piteux dans lequel le cadavre était. Les sodomites saisirent le corps et l'emmènent dans le buisson, le corps était encore chaud, mais il était d'une mouleur. Ces hommes avides de chair déshabillèrent le corps sans ménagement, ils avaient enlevé tout les habits sauf, sauf le caleçon. Ça les excitaient encore plus. Voir enfin un jeune homme devant eux et le toucher. Ils se déshabillent aussi. Puis le premier sans un mot regarde les autres, il tient le caleçon dans ses mains, les autres sont aussi impatients que lui. Les sexes des pédérastes se dressent approximativement en même temps. Ils sont surexcités ; leurs sexes expriment une force incroyable. Le mort ne bouge pas. Le sodomite enlève le caleçon.

A ce moment, ils virent son sexe. Il eu une vague d'effet euphorique sur les contemplateurs du sexe de cet enfant. Ils étaient charmés. Un des pédérastes saisit le caleçon, il le sent. Il met la main du mort contre son sexe. Il se masturbe avec cette menotte innocente. Ils étaient trois. Le premier insérait son vit dans la bouche de la dépouille, le second se masturbait avec la main du mort, le troisième touchait le sexe de cette personne sans vie. Ils poussaient des petits cris. Ils étaient apparemment heureux.

Un tramway passa. Ils s'en moquaient, ce qu'ils avaient devant les yeux était une occasion en or. Dans le tramway, il n'y avait qu'une silhouette : Un garçon. Un garçon aussi jeune que le mort, un garçon qui était en retard en cour, un garçon qui écoutait sa musique. Un garçon qui s'appelle Francis ; Il n'a pas vu ce qu'il se passait dans le buisson. Le tramway continue sa route. Le mort était maintenant maculé de liquide spermatique et de sperme de couleur grisâtre. Les sodomites se défoulaient sur le corps sans y prêter attention, ce n'était qu'un trou. Le cadavre était froid maintenant mais même ce froid là ne contenait pas l'excitation de ces hommes. Ils le sodomisaient à tour de rôle, sans pour autant que leurs membres se ramollissent.

Le garçon était puceau, il était puceau parce qu'il avait peur de coucher avec quelqu'un. Il n'avait pas réellement de libido, il croyait en l'amour. Et la barrière dite sexuelle n'existait pas, il voyait des gens par leurs cœurs et leurs physiques selon la beauté qu'ils dégageaient. Il était d'une gentillesse incroyable et il avait dit la veille à Francis ; L'incroyable, c'est toi, l'incroyable, c'est ce qu'on ne voit pas. Il dormait seul depuis sept ans, il dormait seul depuis qu'il a été violé.


 


 


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