Des nouvelles de Loïc 3

Bureaux tout feu tout flammes

"Loïc, vous nuisez à l'esprit d'équipe" C'est par ces mots que le supérieur du supérieur m'avait définit. Je n'osais lui rétorquer qu'il n'y avait aucun esprit d'équipe et que la seule chose qui pouvait unir tout le service, c'était bien moi ! En effet, les gens étant tous occasionnellement "ligués" implicitement contre moi, ils ne s'occupaient plus ou un peu moins de leurs querelles personnelles. Cela dit, le boss du boss étant trop pressé, et moi étant dans un engrenage qui me tirait vers le bas pour finalement se retrouver à la porte : je préférais opter pour la solution la moins risquée : me taire.

J'allais en salle de pause prendre du café, cette fois ci j'allais prendre du vrai café. A vrai dire, je déteste le café décaféiné, je croisais Bernard qui mettais une pièce de trente centimes d'euro dans le distributeur. Je portais le gobelet déformé par la chaleur à ma bouche pour souffler sur le café lorsque Bernard me vit. Trop tard, je l'avais vu. L'air confus, il fit semblant de ne pas m'avoir vu, avant de se tourner vers moi, opérant une rotation fixe de quatre vingt dix degrés, en bafouillant, il m'avoue que lui aussi n'aime pas le café décaféiné. J'éclatais de rire de façon hypocrite et diabolique ; ah-ah-ah oh-oh-oh. (Dans ce genre là). Soudainement je repris mon air sérieux, le dos droit, épaules écartées, lèvres sans expressions, regard sévère ;

_Vous savez Bernard, hier j'ai regardé la télévision (univers du paraître) , l'esprit d'équipe, ça n'existe plus. Bon, je sais que vous aimez bien parler. Je suis tombé sur le maillon faible et aussi sur l'île de la tentation, le tout couronné par secret story, dans la première émission, j'ai vu des candidats éliminer d'autres candidats, dans la seconde, ce sont des candidats qui jouent à se tenter, à essayer de se faire craquer les uns les autres à se hiérarchiser dans un rapport de sexe et de séductions, puis dans la dernière, on demande tout simplement aux candidats de se dénoncer entre eux. Ne pensez vous pas que ce sont des programmes dangereux pour notre société et en particulier dans le monde de l'entreprise ?
_ euh...

Décidément Bernard avait perdu tout son panache. Il avait un pull en laine -genre- je vais en week end à la baule le mercredi matin- de couleur blanche, qu'il recouvrait d'une vieille parka vert délavée (par le temps). Il semblerait que Bernard n'avait plus envie de me parler et qu'il exprimait une certaine crainte à mon égard. Il s'en allait discrètement, visiblement gêné de ne pas avoir de réponse à me donner. J'essayais de le suivre mais il était plus rapide que moi dans les escaliers, escaliers que je redoutais, il partait presque en courant. Bon sang, ma cravate s'est baigneé dans mon gobelet et gouttait à présent sur mes chaussures en daim.

Je ne me risquais plus à prendre les escaliers, je fis route vers l'ascenseur. J'appuie sur le bouton, pas d'ascenseur. Pourtant j'entendais la boîte juste derrière avec quelques murmures et rires étouffés. Un technicien passant par là, mit sa clé dans la serrure. Les portes s'écartèrent. David remontait son pantalon, la chemise dépassait de tout les coins, tandis qu'Yvette reboutonnait sa jupe noire avant de s'essuyer proprement les lèvres. (On la verra plus tard, sans aucune gêne, faire la bise à ses collègues.) A présent, ceci expliquait la forte fréquence du "tomber du stylo sous le bureau de David", la malheureuse étant obligée de se mettre à quatre pattes sous le bureau de ce dernier. Les deux me regardaient >
AH AH débusqués. David fit tête basse le chemin jusqu'à l'accueil, tandis qu'Yvette me foudroyait du regard. Je montais dans l'ascenseur. Elle se glissa au dernier moment :

_ Tu sais je peux te faire oublier ce que tu as vu ... (elle me touche la verge).
_ Non mais ça ne va pas, rentrez chez vous (c'était tout ce que j'avais trouvé à dire, et bien sur, d'un coup brusque je lui expulsais la main).
_ Allons mon biquet, on stresse ? (Qui croirai ça ? Harcèlement sexuel d'une quinquagénaire sur un jeunot cravaté de dix-huit piges)
_ (Bien heureusement il n'y avait qu'un seul étage à monter) ... Tachez d'être gentille et irréprochable, et j'oublierai (chose impossible).

Ensuite ce fut le passage de la photocopieuse. Là, je tombais sur Virginie, la syndiquée :
_ Oh Virginie ! (je me mis à genoux pour en rajouter encore plus) En me dénonçant ; Vous m'avez remis dans le droit chemin. Je vous remercie, vraiment, du font de mon ... cœur. Vous êtes une seconde mère, aidez moi, je vous en prie, qu'elle est ma voie, grâce à vous j'ai ouvert les yeux, promis j'arrête les biscuits danois, je vous les donne. Je vous en conjure, donnez moi votre main que je l'embrasse, touchez mes cheveux, que je ne les lave plus.
Sans rien dire, bouche grande ouverte, le néon de la photocopieuse qui scanne au loin sa gueule de bonne vieille mégère, je me retire doucement, en dévot, salut bas en reculant.

Déjà en regagnant ma place, les rumeurs faisaient déjà bon train sur la scène de la photocopieuse, puis une fois assis je m'amusai à soupirer le prénom "ah...virginie". La guerre éclatait au sein du service, j'avais commencé à déterrer la hache de guerre à coup de question, d'analyses bidon, de voyeurisme, et de fausses confidences. Le stress envahissait peu a peu la salle, seuls les ventilateurs parlaient entre eux. Les autres étaient dans leurs écrans, à taper des numéros inconnu (toujours pas de résultat pour mon enquête) et à imaginer des stratagèmes pour faire tomber les autres. Déjà la première explosion de cette guerre fit une victime ! L'écran d'Anne-Marie implosait, PPAAFF. Une épaisse fumée sortait de la carcasse de l'ordinateur. L'alarme incendie retentit. Tout le monde sortit. On laissa Anne-Marie sur le sol à l'intérieur, on allait dehors pour attendre les secours. Jean-Pierre affichait un grand sourire. Elle ne revint plus, on apprit qu'elle eut un œil crevé qu'elle fut brûlée au premier degrés aux mains et au visage, et qu'elle décidait de prendre une année sympathique. Elle eut droit à la chirurgie esthétique ; et il faut l'avouer, même avec un œil en moins, elle était plus jolie aujourd'hui.

Bienfaits de ce monde enchanté...
<<<...>>>